Avançons, quittons la 5e République

Par Pierre COURS-SALIES, en réponse au texte de Paul ALLIÈS intitulé « Aller vers une 6e République… ».

Paul Alliès pose une question décisive : comment consolider les forces et la capacité de transformation portée par celles et ceux qui sont « au bas de l’échelle » ?  Une intuition fondatrice de la Convention pour la 6e République (http://www.c6r.org/) a été validée par la mobilisation des Gilets Jaunes, à la suite de celles des trois années précédentes. Ces luttes ont affirmé le lien entre le refus des discriminations, des inégalités, des injustices et, dans un même mouvement, une critique radicale des institutions.

La question décisive est celle des pas en avant pour sortir de la 5e République. Des mesures immédiates sont indispensables afin de (re)donner confiance à celles et ceux qui vivent avec « le sentiment d’exclusion et d’abandon d’une société niée et privée de moyens d’expression ».

Paul Alliès ouvre le débat autour d’« un socle qu’il faut mettre en œuvre : le référendum d’initiative citoyenne, le droit de pétition, les assemblées citoyennes sont des sujets sur la table ». Il rappelle qu’un quatrième sujet ne souffre aucun flou : « Un régime primo-ministériel, un Président de la République qui ne gouverne pas ». Conséquence : les groupes et individus qui font des propositions, préparent des candidatures en vue des prochaines élections – avant et en 2022 – se prononcent-ils/elles pour ces transformations ? Immédiatement ?

Dans la 5e République, depuis au moins 1962, les forces politiques ont moulé promesses et polémiques sur le rôle « du Président ». Il serait inconséquent de ne pas opérer au plus tôt une clarification.

Proposons une méthode afin que le plus grand nombre des « gens de la moyenne » soit force motrice et pas en attente de personnages providentiels.

Un processus avec les « gens de la moyenne »

Discutons donc d’un « processus ». Dans le cadre d’un Accord, ou Pacte de législature, des réformes seront discutées, dans des Assemblées citoyennes locales et nationales, puis formulées et adoptées dans les cinq ans qui suivent. Cela implique évidemment un engagement collectif au moment de choisir une candidature pour l’élection présidentielle. Il ne s’agit donc pas des « promesses » du ou de la candidate ! Ce Pacte de législature entre des député.e.s élu.e.s et un candidat à la présidentielle – dont les fonctions et les tâches seront redéfinies – constituera un des points forts de cette campagne avec les réformes « socle », présentées par Paul Alliès.

Bien sûr, cela implique des discussions unifiant les forces de la gauche d’émancipation sur une double conviction : durant la législature, il faudra développer un processus constituant et, selon les termes de Paul : « l’écriture d’une nouvelle Constitution ne pourra pas rester confinée dans le cercle des « experts ».

Ces propositions sont réalistes : elles prennent en compte le retrait des abstentionnistes devant des « enjeux politiques » formulés par les organisations de toutes les nuances de la gauche. Pour regagner la confiance du plus grand nombre, pour reconstituer une force pour une réelle révolution démocratique, le « processus constituant » doit être présent, dès maintenant, dans les discussions qui fixent les enjeux des batailles politiques à venir.

Certes, les questions ne manqueront pas. Paul Alliès en donne une liste. Inséparables sont les droits élémentaires, la solidarité sociale, l’égalité, le changement des productions et la prise en compte de l’écologie…

Une révolution démocratique, oui !

Faire en sorte qu’un peuple de gauche – qui revendique la démocratie, l’égalité et les droits pour vivre – se retrouve, discute, dégage des buts communs et des objectifs immédiats. N’est-ce pas nécessaire pour répondre aux propositions qui sont issues du « Plus jamais ça ! Préparons le jour d’après », devenu « Plan de sortie de crise » et convergeant avec les autres axes de mobilisations ? On peut même penser qu’il y a, autour de ces textes de quoi délimiter publiquement un « programme de gouvernement », si des forces politiques veulent lire, écouter, répondre, discuter. Un pas vers la construction des forces pour l’émancipation.

L’enjeu est sans doute décisif ! Dans le cadre de la 5e République, la rupture politique à réaliser remonte à l’héritage monarchique et colonial de la 3e République. Il s’agit d’une « République à refaire », en se mettant à l’heure de « l’égaliberté » et de l’autogestion généralisée (A la prochaine, éd. Syllepse, pp. 396-7).  Il s’agit de « comprendre les propositions autour du référendum d’initiative citoyenne comme un chemin de la révolution démocratique ».

Sans perspective de changement radical s’appuyant sur des mesures d’urgence répondant aux exigences sociales, il n’y aura pas de mobilisation. Les promoteurs de « Plus jamais ça ! Préparons le jour d’après » l’ont compris. Nous ne rêvons pas : les forces humaines existent pour de tels buts. Et la crise de la classe dirigeante nous met à pied d’œuvre. Regardons bien du côté du Parti de la Réaction Nationale en train de consolider une Droite dure… 

Remettre en mouvement les forces immenses et leurs espoirs appelle, de la part de toutes les composantes de la gauche, un choix : celui du processus constituant.

Pierre Cours-Salies

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